Episode Bonus au Centre Pompidou: qu'est-ce qu'on ressent quand on crée ?

ILLUSTRATION : JEAN MALLARD

ILLUSTRATION : JEAN MALLARD

“L'art est une garantie de santé mentale”, disait la sculptrice et plasticienne franco-américaine Louise Bourgeois, morte en 2010, à l’âge de 98 ans.

De son vivant, Louise Bourgeois n’a jamais caché ses traumatismes d’enfance, ni le fait qu’ils étaient les principales sources d’inspirations de ses oeuvres. Elle a toujours dit que l’Art lui avait permis, tout au long de sa vie, d’exorciser ses maux.

Mais que se passe-t-il dans la tête des artistes quand ils créent? Est-ce qu’ils ressentent de l’apaisement? De l’excitation? Du bonheur? De l’angoisse? 

Les émotions qui se dégagent de leur oeuvre restent-elles encore en eux, une fois celle-ci terminée ? Qu’est-ce qui explique que le fait de créer des œuvres d’art peut parfois apaiser, calmer, voire soigner ?

L’épisode bonus d’Émotions que vous allez entendre a été enregistré au Centre Pompidou. C’était le 21 novembre dernier, et nous y étions dans le cadre de la 7eme soirée sonore organisée par le musée, dont la thématique était ce soir-là Art & Thérapie. 

Pour cette soirée, nous avons organisé une table ronde avec trois femmes dont les parcours nous ont semblé pertinents pour répondre à toutes les questions sur l’art et les émotions nous nous posions. Car chacune de ces femmes, l’artiste-peintre Inès Longevial, la psychologue Marion Botella et la drama-thérapeute Sandrine Pitarque, font le lien, dans leurs domaines bien spécifiques, entre le monde de l’art et celui des émotions.

L'hypersensibilité peut-elle être une force ?

Illustration : Jean Mallard

Illustration : Jean Mallard

Est-ce qu'on vous a déjà reproché d'être un.e écorché.e vif.ve, de prendre les choses trop à cœur, de ne pas savoir maîtriser vos émotions ? C'est peut-être un employeur qui vous a fait cette réflexion, vos parents, ou une personne avec laquelle vous étiez en couple. Si c'est le cas, et que vous vous sentez en effet souvent trop sensible, rassurez-vous, vous n’êtes pas anormal.e, vous êtes peut-être simplement hypersensible. Et vous n’êtes pas seul.e. Car selon le psychanalyste Saverio Tomasella, qui travaille sur la question depuis près de 15 ans, 30% de la population environ aurait ce tempérament, qui implique une sensibilité plus intense et plus variée que la moyenne.

Cette hypersensibilité peut être constante, ou passagère (suite à un deuil, un licenciement, un changement de saison, ou n’importe quelle autre transformation ayant eu lieu dans votre vie) et peut avoir pour conséquence de se sentir plus à fleur de peau dans un monde qui a tendance à dévaloriser, voire humilier les personnes montrant publiquement leurs émotions.

Dans cet épisode, nous avons rencontré plusieurs personnes qui ont elles fait le choix de revendiquer leur hypersensibilité et de la brandir comme une force. C’est notamment le cas de la journaliste Dora Moutot, qui partage tous les jours ses émotions les plus intenses –allant de la joie, à la tristesse, en passant par la colère– sur les réseaux sociaux. Avec elle, et avec tou.te.s nos autres interlocuteurs.rices (comme l'acteur Philippe Duclos ou le psychanalyste Saverio Tomasella), nous nous sommes demandés pourquoi il était si mal vu de pleurer en public, d’exprimer sa peur ou de faire une grosse crise de colère…

À lire sur le sujet :
- Le psychanalyste et docteur en sciences humaines Saverio Tomasella, auteur de Hypersensibles: Trop sensibles pour être heureux ? publié chez Eyrolles
- La psychologue Elaine Aron, autrice de Ces gens qui ont peur d'avoir peur publié aux Éditions de l’Homme
- La spécialiste de théorie littéraire Evelyn Grossmann, autrice de Eloge de l’hypersensible publié aux Editions de Minuit                                        

Et vous, êtes-vous hypersensible ? Et si c’est le cas, comment vivez-vous avec ce tempérament ? Racontez-le nous sur Instagram, Twitter ou à hello@louiemedia.com.

La retranscription de cet épisode est disponible ici.

L’espoir : nous permet-il d’avancer ?

Illustration : Jean Mallard

Illustration : Jean Mallard

La guerre de Troie terminée et gagnée, Ulysse prend la mer pour rentrer chez lui, à Ithaque, son île, retrouver sa femme Pénélope, son fils Télémaque et son chien. Sauf que vous connaissez la suite, Ulysse se perd en chemin et vit des aventures folles pendant dix ans : c’est l’Odyssée. Et que fait sa femme, Pénélope pendant que son mari fait la guerre et vogue à travers le monde ? Que fait-elle pendant vingt ans ? Elle l’attend. Elle entreprend de tisser et retisser la même tapisserie, croyant dur comme fer au retour de son mari.

L’espoir de Pénélope est-il la force qui lui permet de tenir toutes ces années, sans savoir si son mari rentrera un jour ? Ou est-ce au contraire un poids qui l’empêche de refaire sa vie ? Dans ce treizième épisode, Iris Ouédraogo cherche à comprendre ce qu’est l’espoir. Est-ce un moteur qui nous permet d’atteindre nos rêves ou est-il, au contraire, contemplatif ?

D’un côté, Jonathan Daudey, philosophe, défend l’idée que cette émotion nous empêche de trouver des portes de sortie à des situations qui ne nous conviennent pas, au risque de nous rendre même carrément apathiques. De l’autre, Charles-Martin Krumm, chercheur en psychologie et ancien boxeur de haut niveau, étudie la manière dont l’espoir nous permet ou non de nous réaliser. Avec son équipe, il a même mis au point un “test d’espoir” qui permet de voir si nous sommes naturellement plus ou moins enclin à en éprouver.

Pour répondre à cette question, nous avons également deux histoires. Celle de Laura, qui a attendu, longtemps, que l’homme qu’elle aimait quitte sa femme pour être avec elle. De l’autre Virginie Dedieux, triple championne du monde de natation synchronisée qui a toujours cru qu’elle pouvait décrocher ces médailles. La différence ? Virginie Dedieux, elle, pouvait travailler pour atteindre son but.

Et vous, avez-vous beaucoup d’espoir ? S’il vous est arrivé une histoire forte en lien avec une émotion, vous pouvez nous écrire sur Instagram, Twitter ou hello@louiemedia.com.

La surprise: pourquoi c’est une émotion pas comme les autres?

Imaginez, vous rentrez du boulot. Votre programme, c'est de commander à manger et de regarder le dernier épisode de votre série du moment. Vous montez les escaliers de votre immeuble, vous tournez la clef dans la serrure, vous ouvrez la porte de chez vous et là... dans votre entrée, vous voyez tous vos amis qui crient: "Surprise!". C'est un fait, il s'agit d'une surprise et vous, vous êtes surpris.e. Mais est-elle bonne ou mauvaise?

Illustration: Jean Mallard

Illustration: Jean Mallard

En fait, la surprise, contrairement aux autres émotions (la tristesse est négative, la joie positive) peut être soit l'un, soit l'autre, en fonction de son contenu. Par exemple, une facture imprévue est généralement une mauvaise surprise alors qu'une fête organisée par vos amis sans que vous soyez au courant, est normalement bonne. Cela dépend encore des personnes qui se trouvent dans votre appartement au moment où vous avez ouvert la porte, s'il s'agit de personnes que vous détestez ou de vos plus proches amis.

Le caractère négatif ou positif de la surprise dépend aussi de vous. Vous faites peut-être partie de celles et ceux qui sautent de joie face à une soirée imprévue. Mais vous pouvez aussi faire partie de ces personnes qui détestent être prises de court, et qui, même face à la plus belle des surprises ressentiront de la peur et de la colère.

Ce caractère ambivalent de la surprise est le point de départ des recherches menées par Natalie Depraz, professeure de philosophie à l'université de Rouen. Elle et Thomas Desmidt, psychiatre au CHU de Tours travaillent avec d'autres chercheurs sur la surprise depuis 2012. Grâce à leurs expériences, ils décortiquent cette émotion. Plus encore, ils remettent en cause la classification de la surprise, est-elle même une émotion? Ce qui est sûr, c'est que c'est une émotion à part.

Dans cet épisode, nous remontons à l'histoire de la classification des émotions. Les émotions primaires, le bleu, le jaune et le rouge des émotions sont: la joie, la tristesse, la peur, la colère, le dégoût et la surprise. Comment ont-elles été catégorisées? Et y aurait-il eu une erreur? L'équipe de chercheurs français tend à enlever la surprise de cette liste et ils nous expliquent pourquoi.

Et vous, avez-vous déjà vécu une grosse surprise ? S’il vous est arrivé une histoire forte en lien avec une émotion, vous pouvez nous écrire sur Instagram, Twitter ou à hello@louiemedia.com.

La frustration : comment peut-elle prendre des proportions démesurées?

Illustration : Jean Mallard

Illustration : Jean Mallard

Nous sommes à Melbourne en 2012, c’est le deuxième tour de l’Open d’Australie. Le chypriote Marcos Baghdatis affronte Stanislas Wawrinka, un joueur suisse, et le match se passe mal. Wawrinka mène à tous les sets, et Baghdatis ne fait que perdre pieds. Jusqu’au moment de trop, où pendant une minute et demi de pause, le joueur chypriote est si frustré qu’il passe ses nerfs sur son matériel et casse, en l’espace de 40 secondes, quatre raquettes –dont deux, encore emballées. Frustré par son jeu et la défaite qui se profil, il pète complètement les plombs sous les huées du public.

Ce genre de moment où on désespère de faire quelque chose, où les choses ne marchent pas comme on voudrait, tout le monde en connaît. La frustration monte, comme la pression dans une cocotte minute, jusqu’au moment où vous n’en pouvez plus, et c’est l'éruption.

Il y a une discipline où la frustration se fait énormément sentir, et où elle est particulièrement dangereuse… c’est le poker. Cette frustration qui monte, parce que les choses ne se passent pas comme prévues, et qui donne envie de tout envoyer balader, de tout casser, dans le poker, ça a un nom : c’est ce qu’on appelle, le tilt.

Guillaume Darcourt, ancien joueur de poker professionnel et champion international, nous raconte l’un de ses tilts les plus mémorables, ce moment où la frustration prend le dessus. Nous rencontrons également Axelle Moreau, psychologue clinicienne et chercheuse en psychopathologie à l’université de Laval au Québec, qui est experte du phénomène du tilt au poker. Pier Gauthier, le coach mental de Guillaume Darcourt mais aussi celui de joueurs de tennis comme Sébastien Grosjean et Gaël Monfils, nous éclaire sur manière dont il les aide à désamorcer la frustration pour réussir à continuer à se concentrer sur la partie.

Enfin nous faisons aussi un détour par l’esport, où le tilt est aussi un risque, avec Kayane, championne internationale de jeux de combats comme SoulCalibur. Sean Ross, analyste de données à Facebook, auteur pendant son temps libre du site d’analyse de données Datallama et joueur de League of Legends, nous explique quelles conclusions il a tirées a analysé plusieurs millions de parties de League of Legends pour comprendre l’impact du tilt sur son jeu et trouver comment y remédier.

Un grand merci à Laurent Dumont, Club Poker et Club Poker Radio pour leur aide sur cet épisode.

Et vous, êtes-vous sujet au tilt, à la frustration ? S’il vous est arrivé une histoire forte en lien avec une émotion, vous pouvez nous écrire sur Instagram, Twitter ou hello@louiemedia.com.