Comment le présentéisme résiste aux confinements

Le présentéisme, en France, est solidement ancré : 30% des salariés français pensent qu'ils seront jugés par leurs collègues s'ils quittent le bureau avant 18h, selon un sondage Glassdor d'octobre 2019. Vous savez, le fameux, "tu prends ton aprem aujourd'hui ?". Et 26 % des sondés admettent rester au bureau uniquement pour "se faire bien voir". 

Dans ce nouvel épisode de Travail (en cours), Marion Bothorel s’est demandée comment la culture du présentéisme a évolué depuis le début de la pandémie de coronavirus. Pour ce faire, elle s’est intéressée à un secteur en particulier, où le présentéisme est particulièrement fort : celui des cabinets d’avocats. 

Dans certains cabinets, la culture présentéiste n’a pas du tout fléchi, malgré les directives du gouvernement de mettre en place du télétravail dès que possible. Arthur*, stagiaire dans un cabinet parisien, témoigne que lors du deuxième confinement, “le taux de présence doit être autour de 70% à 80% au sein du cabinet”. Les stagiaires n’ont reçu aucune consigne par rapport au télétravail, mais des attestations dérogatoires pour pouvoir se déplacer au cabinet. Alors que selon Arthur, les tâches sont “100% télétravaillables”. Le cabinet d’Arthur n’est pas une exception. Au point que la ministre du travail, Elisabeth Borne, a dû contacter le bâtonnier de Paris et le conseil national du barreau, début novembre, pour rappeler aux représentants des avocats parisiens que "le télétravail n'était pas une option".

Certains cabinets ont bien mis en place le télétravail, mais seulement pour que le présentéisme devienne virtuel, avec une surveillance des heures de connexion, comme en atteste Charlotte*, elle aussi stagiaire en cabinet d’avocats. 

Si le présentéisme persiste de manière si forte pour Charlotte et Arthur malgré le confinement, c’est qu’en temps normal, hors pandémie, c’est une culture très prégnante dans leur profession. “C'est peut être l'une des dernières bulles où le présentéisme est toujours très présent, mais également encouragé à mon sens”, estime Arthur.

Valence Borgia, associée dans un cabinet d’arbitrage, secrétaire du conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Paris, estime que les organisations de travail qui reposent sur cette culture présentéiste sont en contradiction avec le bon sens, et qu’ils poussent de nombreux avocats, et surtout des avocates, à quitter la profession. D’où la nécessité de réinventer ces modes de travail. 

*Les prénoms ont été changés à la demande des témoins.

Travail (en cours) est un podcast de Louie Media. Présentatrice : Camille Maestracci. Journaliste : Marion Bothorel. Louise Hemmerlé est chargée de production. Cet épisode a été monté et réalisé par Cyril Marchan. La musique est de Jean Thévenin et le mix a été fait par Olivier Bodin. Marion Girard est responsable de production, et Maureen Wilson responsable éditoriale. Mélissa Bounoua est à la direction des productions et Charlotte Pudlowski à la direction éditoriale. 

[Rediffusion] : Pourquoi le télétravail ne va pas devenir la norme

Le coronavirus et les mesures de confinement, puis maintenant de reconfinement, ont fait goûter de nombreuses entreprises au 100% télétravail. Nous vous proposons donc de réécouter cet épisode de Travail (en cours) sur le télétravail, diffusé la première fois le 26 mars 2020. 

Le travail à distance a toujours été un réservoir à fantasmes, et plein d’entreprises ont longtemps tourné autour, en se demandant si c’était vraiment une si bonne idée que ça. Selon une étude réalisée en 2019 par l’IFOP avec Malakoff Médéric-Humanis, 29 % des salariés des entreprises de plus de 10 salariés télétravaillent, de manière le plus souvent occasionnelle et non contractuelle. 

On s’est demandé pourquoi, avec les technologies et moyens de communication actuels, on ne télétravaille pas davantage en temps normal - hors période de confinement, quand les choses tournent à peu près rond. Et pourquoi on a l’intuition qu’on n’allait pas vouloir prolonger ce télétravail à temps plein plus que de raison, une fois la crise passée. 

Au micro de Judith Chetrit, Rodolphe Dutel nous raconte son expérience lorsqu’il travaillait chez Buffer, une entreprise américaine qui a la particularité de ne pas avoir de bureaux : ses salariés sont dispatchés aux quatre coins du monde, en télévrail. Il nous explique les atouts et les risques posés par cette organisation du travail : “C’est assez solitaire. C’est pour ça que je suis membre d’espaces de travail partagés, parce que si on ne recrée pas la camaraderie, on se sent vite très seuls. C’est mon plus gros problème là-dessus, c’est l’isolation et la solitude.”  [17:11] 

Nous avons voulu savoir si cette solitude et ce manque de lien social pouvait avoir un impact dans notre travail. Nous sommes allées interroger Driss Boussaoud, un neuroscientifique qui nous explique que notre cerveau ne fonctionne pas exactement de la même manière si on est seul ou si l’on est entouré : “Les neurones sociaux, ce sont ceux qui fonctionnent de préférence quand je suis en présence de quelqu’un. Et les neurones asociaux ce sont les neurones qui fonctionnent le préférence quand je suis seul. ” [26:59]

Et vous, comment est-ce que vous vivez le télétravail ?  Racontez-le nous sur Instagram, Twitter ou à hello@louiemedia.com


Travail (en cours) est un podcast de Louie Media. Présentatrice : Marie Semelin. Journalistes : Judith Chetrit et Marie Semelin. Louise Hemmerlé est chargée de production. La réalisation a été faite par Cyril Marchan. La prise de son a été faite par Bernard Natier, le mix par Olivier Bodin et la musique est de Jean Thévenin. Marion Girard est responsable de production, et Maureen Wilson responsable éditoriale. Mélissa Bounoua est à la direction des productions et Charlotte Pudlowski à la direction éditoriale.

Les leçons que tirent les chef.fe.s d’entreprise de la crise

Il y a d’abord eu l’urgence, la panique des premiers jours. L’annonce du confinement a précipité des milliers d’entreprises dans une crise brutale. Selon l’assureur-crédit Coface, les faillites devraient bondir de 15% en France cette année. Pourtant, malgré les nombreux commerces à l’arrêt, les chantiers interrompus, les salles de concert et les stades déserts, l'activité économique ne s’est pas complètement arrêtée pendant le confinement. Elle s’est poursuivie, à un autre rythme, complètement chamboulé. 

Dans un système économique féroce où il faut souvent s’adapter pour survivre, Louise Hemmerlé a demandé à six dirigeant.e.s d’entreprise comment il.elle.s avaient traversé cette période, et ce qu’il.elle.s allaient pouvoir en retenir. De l’agroalimentaire au conseil en passant par la cosmétique, il.elle.s racontent comment il.elle.s ont dû revoir des stratégies depuis longtemps en place, inventer de nouvelles manières de fonctionner, et les leçons qu’ils en tirent : sur leurs stratégies commerciales, sur la raison d’être de leur société, sur le télétravail, sur les rapports interpersonnels au travail en temps de pandémie. 

“La crise elle nous apprend qu'on ne peut rien faire tout seul, qu'on est tous dépendants les uns des autres, qu'il y a une chaîne, qu'il ne faut pas la briser. On ne peut rien faire sans nos fournisseurs d'emballages, on ne peut rien faire sans nos transporteurs. Donc on a vraiment besoin d'être ensemble” (21:00) nous dit par exemple Emmanuelle Roze, co-fondatrice de Lou Légumes. “Là, on a des interlocuteurs qu'on trouve plus à l'écoute, qui communiquent plus, avec qui on communique plus. Et j'espère que ça va rester, que cette solidarité elle va rester.” (22:17) 

Et vous, quelle leçon tirez-vous de cette période si particulière par rapport à votre travail ?  Racontez-le nous sur Instagram, Twitter ou à hello@louiemedia.com


Travail (en cours) est un podcast de Louie Media. Journaliste et présentatrice : Marie Semelin. Louise Hemmerlé est chargée de production. Cet épisode a été monté et réalisé par Cyril Marchan. La musique est de Jean Thévenin et le mix a été fait par Olivier Bodin. Marion Girard est responsable de production, et Maureen Wilson responsable éditoriale. Mélissa Bounoua est à la direction des productions et Charlotte Pudlowski à la direction éditoriale.